Structure moléculaire des chiens portugais et leur parenté avec les sloughis, les aidis et les chiens de village tunisiens
Résumé du Dr. Dominique de Caprona 
Traduit de l’anglais par le Dr. Anne d’Ersu
 © de Caprona 2009 

Cette étude intitulée "Molecular structure in peripheral dog breeds: Portuguese native breeds as a case study", de A. E. Pires*et ses collaborateurs s'inscrit dans le prolongement de l’étude précédente portant sur l’ADN mitochondrial des chiens portugais et leur parenté avec les sloughis, les aidis et les chiens de village tunisiens. Ces mêmes races de chiens ont été caractérisées à l'aide de 16 microsatellites et de 225 marqueurs AFLP (“Amplified Fragment Length Polymorphism") et on a analysé leur différenciation génétique.

C’est la première fois que des microsatellites et des marqueurs AFLP sont utilisés ensemble pour comparer les modes de différenciation génétique chez les chiens portugais autochtones et d’autres races géographiquement voisines. Le but de cette étude était d’analyser les corrélations entre l’affiliation des races et leur structure moléculaire, leur structure phylogéographique, les évènements historiques, les races et les chiens errants de la même région, et de voir si ces races montrent une distribution géographique distincte de leurs allèles.

Le recours aux marqueurs AFLP dans des études génétiques sur des populations de chiens a été jusqu’a présent limité, mais ils offrent sur le plan statistique une puissance de discrimination plus forte, surtout lorsque la différenciation est faible.

Différenciation génétique
Microsatellites : près de 92% de la variation peuvent s'expliquer par des différences individuelles et aucune structure géographique n’a été décelée.
Marqueurs AFLP : avec ces marqueurs le chien de garde Castro laboreiro, le berger portugais, le chien d’eau portugais, l'aidi et le sloughi se sont  distingués de toutes les autres races. Une analyse approfondie a permis de différencier ces races les unes des autres et de les séparer en deux groupes, le chien de garde Castro Laboreiro formant un groupe à lui seul.
En ce qui concerne les populations restantes, le chien de montagne Estrella et le Berger Alentejo ont formé un groupe, indépendant des autres populations de cette étude.
D’autres structures ont été détectées qui permettent de distinguer les uns des autres le Mastiff espagnol, le Pointer portugais et le chien de bétail des Açores.
Le Podengo portugues, les chiens errants portugais et les chiens errants tunisiens sont restés indifférenciés.

Identification des différentes races
Microsatellites:le pourcentage général de sujets correctement identifiés a été de 12%. Aucun sujet n'a été classé dans les races suivantes : Mastiff espagnol, pointer portugais, berger portugais, aidi, sloughi et chien de village tunisien. Seul le mastiff transmontano a montré le pourcentage le plus élevé de sujets correctement identifiés : 67%.
Marqueurs AFLP:en opposition totale avec les microsatellites, les marqueurs AFLP montrent un fort pourcentage de sujets correctement identifiés, allant de 73.1 % à 93.9 %. Tous les sujets des races Mastiff espagnol, berger portugais, pointer portugais, chien d’eau portugais, aidi et chiens de village tunisiens ont été correctement affectés à leur population d’origine. Le pourcentage de sujets correctement identifiés avec les marqueurs AFLP s'est situé entre 46.4% et 70% pour le chien de bétail des Açores, le Podengo portugues, le Sloughi et les chiens errants portugais.

Diversité génétique
Les valeurs de la diversité génétique tirées des microsatellites et des marqueurs AFLP ne peuvent être directement comparées. Cependant, avec ces marqueurs les races ne sont pas classées pas de la même façon. Les microsatellites révèlent des processus démographiques récents ou en cours. Les marqueurs AFLP,  avec leur évolution plus lente et leur polymorphisme moins marqué, diffèrent peut- être dans leur sensibilité aux goulots d'étranglement démographiques et à la sauvegarde des populations et conservent mieux le signal d'une structure génétique ancienne.

Caractérisation génétique plus fine des populations 
Les données des marqueurs AFLP ont permis une distiction plus fine entre le mastiff espagnol, l'aidi et le sloughi. Aucune différentiation génétique n'a été mise en évidence entre le berger Alentejo et le chien de montagne Estrella. On pense que le chien de montagne Estrella est l’ancêtre du berger Alentejo et que ces deux populations étaient autrefois en contact pendant la transhumance.

La particularité du chien de garde Castro Laboreiro identifiée dans la première étude se confirme ici avec les marqueurs AFLP. Cependant, étonnamment, cette race n’a pas de microsatellites personnels.

Conclusion
Les marqueurs AFLP ont permis d'obtenir un pourcentage très élevé d’affiliations aux différentes races, bien supérieur à celui des microsatellites, confirmant ainsi leur utilité pour les études de différentiation des populations et d’identification des races.
Les marqueurs AFLP ont aussi permis une caractérisation plus fine des structures génétiques géographiques et la détection d'une différentiation génétique importante entre les chiens portugais, espagnols et d’Afrique du Nord.
Historiquement, la péninsule ibérique a été en contact étroit avec l’Afrique du Nord, principalement durant les siècles d’occupation par les arabes et les berbères. Cette occupation explique l’influence de l’ADN mitochondrial (ADNmt) d’Afrique du Nord chez les  ibères, que l’on ne retrouve nulle part ailleurs en Europe. Pendant cette occupation, des animaux d’Afrique du Nord ont probablement aussi été introduits en Ibérie. De fait, un mélange d'ADNmt et d'haplotypes de la caséine a été détecté chez les bovins et les moutons de la péninsule ibérique.

On n'avait pas trouvé d' “empreinte Africaine” dans les races de chien portugais avec l’ADNmt lors de la première étude et les microsatellites et marqueurs AFLP confirment  ce résultat antérieur.

Remerciements

Tous mes remerciements vont à A.E.Pires, qui a mis au point ce texte, ainsi qu'à tous les photographes qui m'ont fourni des clichés pour cette page.

Références 

Pires A.E., I. R. Amorim, C. Ginja, M. Gomes, I. Godinho, F. Simoes M. Oom, F. Petrucci-Fonseca, J. Matos and M. W. Bruford (2009): "Molecular structure in peripheral dog breeds: Portuguese native breeds as a case study." International Society for Animal Genetics, Animal Genetics, doi:10.1111/j.1365-2052.2009.01849.x

Les races portugaises et espagnoles de cette étude